Expliquer/comprendre

Mis à jour le mardi 1er septembre 2015 , par Boris Debot

Définition (TLFI)

Expliquer, c’est faire comprendre quelque chose par un développement, une démonstration écrite, orale ou gestuelle. Autrement dit, c’est renseigner, faire connaître quelque chose par un développement détaillé ou encore éclaircir, rendre compréhensible ce qui a un sens vague, obscur ou inconnu. En un sens quelque peu différent, expliquer signifie faire connaître la raison, l’origine ou la cause de quelque chose. Comprendre, c’est avoir, élaborer, recevoir dans son esprit la représentation nette d’une chose, d’une personne. C’est aussi saisir intellectuellement le rapport de signification qui existe entre tel signe et la chose signifiée. Enfin, se faire une idée claire des causes et des conséquences qui se rattachent à telle chose et l’expliquent.

Sens philosophique

On remarquera que les définitions précédentes usent du mot « comprendre » dans la définition d’ « expliquer », et inversement, ce qui rend difficile leur réelle distinction. Celle-ci est, au contraire, fondamentale en philosophie, notamment depuis les travaux de Dilthey. Pour ce dernier, l’explication est propre aux sciences de la nature, par exemple la physique. Expliquer, c’est rendre compte d’un phénomène, en le subsumant sous une loi générale, en en faisant un « exemplaire » de celle-ci. L’explication traite des faits naturels en les intégrant dans des chaînes causales (comme chez Newton par exemple), en en faisant donc des rapports « mécaniques » de cause à conséquence. La compréhension est quant à elle propre aux sciences de l’esprit (histoire, psychologie). Elle reconduit le phénomène non à sa cause, mais à ce à sa raison, ou encore à l’intention qui l’anime. Elle est donc à la recherche du sens de l’action, sens d’une intériorité psychique connue à l’aide de signes perçus de l’extérieur par nos sens. C’est pourquoi elle appelle une herméneutique (une science de l’interprétation).

Exemple

Pensons tout d’abord au choc entre deux boules de billard. Ici, nous serons à coup sûr satisfaits d’une explication par les lois de la physique, en termes de causes et de conséquences et ne jugerons pas qu’elle élude un aspect essentiel de ce choc. Pensons à présent à une situation dans laquelle un homme donne un coup de poing à un autre homme et cherchons-en les causes : peut-être a-t-il reçu auparavant un coup de poing de cet homme ; peut-être exécutait-il simplement l’ordre d’une troisième personne, etc. Mais une telle explication nous semblera incomplète voir fausse car elle manque la dimension subjective de l’action. Et l’on ne rendra guère mieux compte de celle-ci si l’on découvre les processus neurologiques, physiologiques de l’ « agresseur ».

Pour aller plus loin

L’opposition entre expliquer et comprendre ne préjuge en rien de leur possible coexistence. Weber montre ainsi que l’action sociale doit d’abord être envisagée compréhensivement, c’est-à-dire du point de vue subjectif de son auteur ; à partir de là pourront être expliquées causalement ses conséquences. Ricoeur quant à lui essaie d’élaborer une dialectique de l’explication et de la compréhension, l’une et l’autre se suscitant, se relayant, etc.