Abstrait/concret

Mis à jour le mardi 1er septembre 2015 , par Boris Debot

Définition (TLFI)

L’abstrait est le résultat d’une opération d’isolement, par analyse, d’un ou plusieurs éléments du tout dont ils font partie, de manière à les considérer en eux-mêmes et pour eux-mêmes. Le concret est au contraire ce qui se rapporte à la réalité considérée dans sa totalité.

Sens philosophique

La définition précédente montre bien que l’abstrait résulte d’un processus. En philosophie, l’abstraction a souvent le sens de généralisation, celles-ci permettant d’extraire les propriétés communes à plusieurs êtres en supprimant leurs différences considérées alors comme inessentielles. Ainsi, on peut se former une idée d’arbre à partir des multiples arbres perçus. L’abstraction permet également de former des idées générales, ne se rapportant plus aux êtres concrets mais à leur qualité : humanité, sagesse, etc. Le concret est au contraire ce qui se donne « naturellement », via une sensation, une perception, etc. Ce dont nous avons l’expérience, c’est toujours de tel arbre singulier. La connaissance (scientifique, philosophique) suppose que nous quittions ce plan de la différence entre les êtres, plan de la contingence, pour nous attacher à leurs ressemblances. Mais il faut se méfier des « abstractions vides » qui font perdre de vue les choses et inventer des chimères.

Exemple

L’opposition abstrait/concret est manifeste dans la formation des mots généraux, en nous inspirant de Locke. Reprenons l’exemple de l’arbre. La seule chose qui existe, ce sont les arbres singuliers et pourtant il existe un mot général qui « représente » (to stand for) chacun de ces arbres. Ce mot est le signe d’une idée générale. Or celle-ci se forme en soustrayant des idées particulières les circonstances spatiales, temporelles et plus généralement tout ce qui enferme la chose dans l’existence singulière. De l’arbre particulier, on négligera par exemple qu’il pousse en tel lieu, qu’il a des feuilles caduques, qu’il perd actuellement celles-ci Ce n’est que grâce un tel processus d’abstraction que peut être formée l’idée d’arbre, autrement dit que les arbres particuliers peuvent se conformer à cette idée.

Pour aller plus loin

On peut se demander si les idées abstraites existent réellement ou si elles ne sont que le résultat d’une construction. Ainsi, pour Platon, le Beau, auquel tel homme beau par exemple participe, est un être réel (existant dans le monde des Idées). Au Moyen-âge, la querelle des universaux, qui opposa les réalistes aux nominalistes, fut l’occasion d’un riche débat à ce sujet. Les réalistes soutenaient que les universaux, par exemple la blancheur, était une qualité réelle des choses. L’activité de connaissance ne ferait que retrouver ces entités. Les nominalistes posent au contraire que les universaux ne sont rien d’autre que des conceptions de l’esprit, des concepts et que seuls existent des êtres singuliers. Les universaux comme la blancheur, n’ont qu’une fonction pratique, une utilité.